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14 décembre 2011 3 14 /12 /décembre /2011 16:40

 JuraEmmental 219

 

 

                                                                                                                                                                                                                                      

                                            Vers le Napf dans l’Emmental

Où en sommes-nous ?

Dès « Rando1 » nous sommes partis en septembre sous la lumière des châtaigniers dans l’idée que le but, c’est le chemin.   " Hier donc, au vent sifflant, je suis parti vers le chemin."

Faire du chemin c’est aussi faire des détours et des découvertes. C’est voir le chemin sous d’autres aspects. C’est comprendre le processus inimaginable qui nous conduit au-dessus d’une falaise nous paraissant infranchissable. C’est encore parcourir des alternatives et revenir sur le chemin principal.

   

Ferret 347

C’est ce que nous faisons maintenant en application du terme de « re-entrance ».

Ce terme a une origine informatique. Lorsqu’un programme se déroule, il fait appel à des sous-programmes qui sont exécutés. Ensuite il y a retour au programme principal. Le programme re-entre à l’endroit qu’il avait quitté en sauvant ses paramètres. Encore une fois, l’informatique permet de formuler, et donc de mieux comprendre, des phénomènes de la vie quotidienne, comme une journée vouée à une tâche principale maintes fois interrompue par des coups de fil ou des visites et chaque fois re-prise. Bref, on vit le quotidien habituel, on s’en écarte, on y re-entre.

            Les chemins sont multiples. Certains sont parallèles.

            Ils se déroulent comme des séries causales indépendantes.   Leur croisement serait l’expression d’une intervention  du hasard.

Un cas de chemins parallèles est décrit dans le récit « Synchrone ».

Le randonneur sur le rivage et le capitaine du caboteur sont en dialogue virtuel sans pouvoir vraiment communiquer. Situation fréquente dans l’existence et même sur le WEB. Mais chacun, voyant l’autre, s’imaginant son cheminement de pensées, en éprouve une sorte d’émotion poétique.

  Voilà pour la théorie.

            L’expérimentation sur le terrain est évoquée dans les articles « From Nasa to Solutré » et « Col du Bastidon ».

« Après le col du Bastidon » nous informe très modestement sur la théorie des fractales, ces entités dont les parties ont même forme que le tout, mais à une autre échelle.

« Back to fractals » tente d’en fournir une application littéraire.

De retour dans la réalité stricte à l’époque du 11 novembre qui nous rappelle la terrible grande guerre. Les articles « 11 Novembre » et « Chemins qui se cherchent » rendent les échos des  combats autour d’Ypres et de la Somme. D’où « Les chemins de l’absurde ».

Après tout cela, il est bon de respirer.

Et qui peut mieux que John Cowper Powys nous promener au grand large dans la profondeur des paysages et des âmes humaines ?

On re-entre dans la réalité pure en prenant conscience du passage récent au nombre de 7 milliard d’hommes et de femmes. Nombre impressionnant qui illustre l’incroyable succès de l’homo sapiens.

Succès non sans péril.

Dès lors se pose la question de l’homme.

 Dhrontal 028 

 

 

Chemin qui parcourt tous les biotopes. D’où l’évocation dans la chronique du Recodier d’un passage dans le désert de la Serrane et la remarque : « Nous sommes dans un lieu peut-être privilégié par l'Evolution même pour qu'Elle puisse SE PENSER ».

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28 novembre 2011 1 28 /11 /novembre /2011 16:38

Sept milliards

Il est clair que l’on ne peut plus vivre comme on le faisait à l’époque où nous étions 6.999.999.999.

Le spectre de la fourmilière est en vue. velos2.jpg

Il faut alléger notre trace sur le cosmos. Mais changer d’habitudes, c’est changer l’homme. Et on ne change efficacement que ce que l’on connaît.

Or qu’est ce que l’homme ?

 

Comment le caractériser ?

Par la raison ou l’intelligence ? Mais on en trouve dans une certaine mesure chez l’animal. Et l’orchidée manifeste une grande intelligence en prenant la forme d’un bourdon pour attirer les abeilles. Le comportement des hommes est par ailleurs fort souvent déraisonnable.

Par l’amour ? L’animal n’en est pas dépourvu.

Par la créativité ? Toute la nature est créative.

La rationalité, l’amour et la créativité ne sont donc pas le propre de l’homme.

 

On pourrait le qualifier comme étant le titulaire des droits de l’homme si cela n’avait pas un petit relent de pétition de principe.

 

Certains proposent le rire comme caractéristique propre à l’homme. Mais avez-vous déjà entendu un oiseau ricaner dans la forêt ? Et le ricanement est proche du rire.

 

La voie du rire ouvre une piste : Je serais homme dans la mesure où je serais ridicule. L’animal ne l’est jamais, ni la fleur, ni la pierre.

 

Mes pensées souvent partent à la ou dérive. Je fabule. A ce que je suis, je substitue ce que je ne suis pas. Le résultat, je le soumets mentalement au regard des autres. Ridicule cette non-adéquation au réel !

 

Le ridicule est tout aussi marqué en société. On s’y affuble forcément de masques qui visent à choquer ou à camoufler. On se déguise. La mode !

On se pousse. Mais « les cimetières sont remplis de gens indispensables ».

Que dire de certaines activités comme la création d’un gouvernement, la gestion des banques, l’administration d’un continent comme l’Europe…

 

Faut-il échapper au ridicule ?

Les grands génies n’y échappent pas lorsqu’ils se laissent sombrer dans le mélodrame. Voyez Dostoievski ou Shakespeare.

Ne pensons pas les égaler, mais soyons pleinement homme. Soyons ridicules.

 

Cette hypothèse pourrait cependant ne pas susciter l’unanimité des 7 milliards.

 

Autre piste : l’homme serait l’aboutissement de l’Evolution. Qu’en savons-nous ? L’évolution pourrait se poursuivre indéfiniment et l’homme ne serait que le résultat éphémère d’un épisode de la vie

 

Consultons la philosophie. Il est écrit quelque part : « je pense, donc je suis ». Il suffirait d’ajouter « donc je suis homme ».

Not at all !

Je marche, je tends vers l’étape, je rêve… je subis et surmonte des contraintes.

Je deviens.

Dès lors il est clair que j’étais. Je ne pars pas à partir de rien. L’Être précède la pensée ! Celle-ci apparaît graduellement avec l’homme qui avant tout se développe instinctivement par trial and error. Beaucoup de gens d’ailleurs ne penseraient que très occasionnellement !

 

Autres pistes de la philosophie : l’homme est un Signe. On doit cette idée à Charles Peirce, fondateur de la sémiotique. L’homme réfère donc à autre chose que l’homme. Attention ! On entre pragmatiquement dans les arcanes de la métaphysique !

 

Sommes-nous réels ? Nous vivons à l’époque du virtuel. 7 milliards d’hommes virtuels pèseront sans doute moins que 7 milliards d’hommes réels.

 

Un doute se fait jour.

L’homme m’échappe.

 

Il me fuit comme mon ombre lorsque j’ai le soleil dans le dos. Charles201111.JPG

 

 

L’homme ne serait qu’une ombre. « Shadows, we are shadows » murmurait Pitt sur son lit de mort.

 

 

Il reste une échappatoire. Relisez le chapitre « Misère et grandeur de l’homme » de Pascal. « L’homme passe l’homme. »  Plotin (205-270) déjà avait écrit : "Il n'y a pas de point dont je puis dire "jusque là, c'est moi"".

 

Mais le chemin du dépassement est éprouvant.

 

Encore une fois, tous ne seront pas d’accord.

 

Dès lors, j’abandonne.

 

 

 

La question reste ouverte.

 

 

 

 

 

 

 

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23 novembre 2011 3 23 /11 /novembre /2011 12:10

John Cowper Powys (1872 – 1963) 

Powys2.jpgPourquoi ne lit-on pas Powys alors qu’il est considéré par certains, dont Georges Steiner, comme un des maîtres de la langue anglaise ?

Le grand génie fait peur, dit Steiner.

L’œuvre de Powys est immense. Des romans dont cinq majeurs : Wolf Solent, Camp Retranché (Maiden-Castle), Les Enchantement de Glastonbury, Les Sables de la Mer, Owen Glendower, Porius ; une autobiographie ; des recueils de monographies sur des écrivains ; des traités de philosophie existentielle ; un journal ; de la correspondance.

Sa vision dépasse la première moitié du 20e siècle, époque où  il écrit l’essentiel de son œuvre, et annonce le siècle présent. Il y voit un changement total de paradigme qu’il mesure à l’aide du langage de l’astrologie : le passage de l’ère du Poisson à celle du Verseau.

Il s’agit de la fin d’un ordre rigide fondé essentiellement sur la raison, sur l’autorité, sur un ordre d’origine latine qui donne aux hommes la prédominance dans la société, et sur le début d’un ordre plus souple, féminin, plus proche de l’ancienne culture grecque, plus tributaires de l’intuition.

Le Soft l’emporterait sur le Hard.

C’est la fin d’une vision purement anthropomorphique de l’univers. Le Cosmos devient l’incontournable partenaire de l’homme. Et l’homme lui-même est reconnu en tant qu’élément de ce cosmos.

Dès lors, l’aventure de l’homme est une manifestation du cosmos lui-même, la culture son expression et l’homme lui-même le cosmos qui se pense.

L’homme attentif et sensible percevra dans les événements de sa vie et de son environnement les relations qui le lient avec l’univers. Mais pour Powys l’univers n’est pas monolithique.

Il pressent « l’existence parallèle de plusieurs couches de réalité… ce qui rend toute réalité incertaine, comme s’il y avait des flots béants de Non-Etre sous chaque manifestation particulière de l’Etre » (Maiden Castle p. 84). Le terme de « multivers » convient mieux que celui d’ « univers ».

« L’acceptation de l’inconsistance – chose essentielle dans l’expérience de chacun – me fut facile du fait de mon habitude de vivre ma vie sur les bases de ce qu’on pourrait appeler un monde pluraliste », dit-il dans son Autobiographie (p. 424). 

Le Multivers relève d’une ontologie complexe, non sans rappeler l’univers en couches de Plotin, à laquelle correspond une épistémologie fondée sur l’expérimentation par la sensation.

« La sensation est un messager »  disait Plotin. Messager qui conduit à l’intelligible. Qui conduit à l’extase, dirait plutôt Powys.  L’extase, c’est ce que recherche notamment le poète Wordsworth : « Pleasure which there is in life itself”. La vie au mystère insondable est la valeur suprême.     

Dès son enfance dans le Dorset, vivant à Weymouth ou Dorchester, à la mer et à la campagne,  Powys entend « jouir de l’essence purgée et cependant universelle d’expériences marginales qui remplissent les recueils de poésie telles que : l’errance de coups de vent au crépuscule ; visions fugitives de fumées qui ondulent à l’aube ; immobilité de vieilles barges amarrées le long d’anciens déversoirs ; plaintes de branches aux carrefours désolés… » (Autobiography p. 307).

En marchant il découvre le « mystérieux point de rencontre de l’animé avec l’inanimé qui abolit la distinction sujet-objet.

Powys est animiste, trait qui confère une valeur quasi mystique à certains événements.

Un épisode évoqué dans l’Autobiographie, rappelle la madeleine de Proust. En approchant d’une ancienne muraille aux abords de Cambridge, il est soudain frappé par la présence sur ces pierres de taches vertes de mousse et d’herbe.

 

“Quelque chose dans l’aspect de ces pousses ténues me saisit et me transporta dans une sorte de septième ciel... J’appellerai cela une sensation d’au-delà. Plus tard, d’autres vues similaires déclenchèrent la même sensation ... curieux point de rencontre entre l’animé et l’inanimé ».

 

Sujet-objet, animé-inanimé font partie des dichotomies présentes dans la texture de la réalité, comme il l’écrit dans la préface de son roman Wolf Solent : “Ce qu’on peut appeler le dessein et l’essence la plus intime de ce livre, c’est la nécessité des opposés. Vie et Mort, Bien et Mal, Matière et Esprit, Corps et Ame, Réalité et Apparence doivent se rejoindre, doivent être forcés l’un dans l’autre, dans une dépendance établie entre eux.”

Les opposés sont sources de tensions créatrices et de souffrances.

Il faut changer la vie, non pas par une révolution extérieure comme celle des disciples situationnistes de Guy Debord, mais par une technique de vie intérieure à créer, par une vision personnelle, par une « life-illusion ». Il faut pouvoir être heureux même en enfer, selon un proverbe tibétain. L’imagination est la ressource essentielle pour atteindre le détachement et jouir de l’élémentaire. Powys refuse la compétition. Il ne joue pas le jeu imposé par les traditions sclérosées de la société.

Comme l’Angleterre est arrivé à la démocratie sans révolution à la française, Powys atteint la liberté sans devoir vivre un événement public analogue à celui de mai 1968. Il atteint le nouveau paradigme sans avoir la fibre des soixante-huitards, la raison peut-être de ne pas être lu. La différence, c’est la vie  intérieure qui permet de s’abstraire des contraintes parfois cruelles de la vie. “Au diable l’art. Mes écrits ne sont que de la propagande pour une philosophie de vie (Autobiographie p. 64)”. Est-ce possible sans la marche ?

On n’atteint pas sans aide une vie intérieure assez riche pour faire face à tous les manques de la vie. Powys a des maîtres : Rabelais, Dostoievski, Hardy parmi les principaux… (Il rencontra Hardy dans le Dorset.)

Il apprécie quelques grands esprits imaginatifs tels que Pythagore, Socrate, Plotin… Non des compétiteurs, mais des frères qui ont pu construire une « life illusion » et ainsi vivre avec les pires contraintes de la vie extérieure. Et intérieure aussi tels que les affres et les transports du sexe auxquels est lié un penchant au sadisme. « Neurotic John », dit-il de lui-même. La névrose ne dépend-elle pas pour bonne part d’un refus de la réalité ?

Powys, lecteur de philosophie classique, est de tendance idéaliste lorsqu‘il dit : “Je refuse de croire qu’il y ait quelque chose comme la réalité en dehors de l‘esprit qui la contemple.” 

Mais en tant qu’animiste, son héros, le barde Taliessin, s’exclame “toi et moi” alors qu’il perçoit tout un système de relations exprimées par des sensations reflétant la réalité de l’environnement. Un “tu” qui est extérieur au “moi”  où  qui dépasse ce moi qu’il englobe. Tout est imbriqué, tout est à la fois objectif et subjectif. Comme chez Nicolas de Cuse, les opposés (ici le tu et le moi) coïncident par fusion.

Le cosmos, réalité à la fois extérieure au moi et dont le moi est composante, est d’autant plus réel qu’il est animé.

En fait, Powys refuse de se limiter aux apparences. Il veut atteindre le fond des choses, le système de relations qui unit le multivers. Aurait-il reconnu dans le WEB un bel exemple de multivers ?

Il refuse absolument la vision réductrice de la science. Car pour lui toujours

« There is a mohawk in the sky”.

 

1.  Paysages du Dorset

Chesil Beach où sont dispersées ses cendres Dorset-049.jpg

 

 

 

 

 

 

Maiden Castle , lieu du roman du même nom

  Dorset-099.jpg

 

 

 

 

 

                                                       Lulworth Cove

                               Dorset-150.jpg

Dorset-087.jpg2.    

 

 

 Thomas Hardy

 

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18 novembre 2011 5 18 /11 /novembre /2011 06:35

 

Les horizons de la Picardie évoquent ceux des  grands causses.

Comme même caractéristique, l’infini.

plateauPicard

 

Sur grandes étendues un plateau agricole fissuré de vallons verdoyants faits de pâturages et de bocages. Pays à la fois ouvert et intime. Il est parcouru de rivières tranquilles, L’Avre, l’Ancre, l’Hallue qui se jettent dans la Somme. Celle-ci débouche sur la mer en un estuaire grandiose.

 

Mais la Somme c’est aussi l’évocation de l'effroyable grande guerre. Entre Ypres et Péronne, le front fut défendu par les troupes du Commonwealth.

Les terribles combats de juillet 1916 restent ancrés dans les mémoires.

 

Combats aux inépuisables vestiges.  Somme 083

 

 

 

 

 

 

 

 

Toujours à la recherche de chemins qui cherchent, je débouchai dans un vallon inconnu. Un Somme-123.jpgpetit panneau y indique le nom d’une division galloise: « 38 ain Rhaniad Cymreig ».

   

 

C’est un «val qui mousse de rayons ».

Le petit asphalte est relayé par un chemin de terre.

Aucun habitat.

Soudain sur ma droite, en contrebas d’un talus, le monument.

 

  

En rouge vif rayé de noir, tout en contorsions de ferrailles, un dragon toujours en lutte. Nous sommes en face du bois de Mametz non loin de Contalmaison.

J’apprendrai plus tard l’épisode tragique de combats qui n’aboutirent à aucun résultat décisif. Tout ce front témoigne d’une vaillance et de souffrances gratuites.

 

Le monument !

 

Par sa simple présence il divise l’espace entre deux continents. D’un côté la nature, de l’autre la culture. Pictogramme, tout un récit à lui seul. Comme certaines images marquées par la réussite, il est plus qu’une représentation, il est une dynamique, il est encore toujours en action.

Inattendu, outrancier comme cet autre Gallois, John Cowper Powys, il témoigne de l’imagination celte qui aussi put se manifester dans l’harmonie des enluminures.

 

Chaque détail reflète par sa véhémence l’entièreté du monument.  

 

Une Fractale !

 

Monument unique et multiple comme si toute la division revenant de combat s’était agglomérée en une solidarité définitive.

 

D’où vient cette forme ? Certainement du plus profond de la conscience collective d’un peuple. Peut-être est-elle signe d’une distinction entre le bien et le mal.

Séparation aussi des armées qui chacune défendait une idéologie.

Monument du vainqueur qui paya cher sa victoire.

Quelle victoire ?

Car aujourd’hui, en 2011, les ennemis d’hier tentent de construire ensemble un continent unifié.

Comment définir l’Homme qui hier peut mener une guerre acharnée et aujourd’hui oser la paix ?

 

Ce monument est un pictogramme descendant de l’art rupestre pour distinguer l’oubli du souvenir.

 

Les chemins parcourent l’espace sans révéler d’emblée ce qu’ils cherchent. Très anciens souvent, ils ne sont pas de toujours. Combien de chaussées romaines ensevelies sous l’asphalte ou anéanties par les pelles mécaniques.

Chaque chemin cherche et se fond dans un autre chemin sans que l’on sache s’il a trouvé ce qu’il cherchait ou s’il s’est trouvé lui-même.

Reste un réseau d’apparence arbitraire d’éléments souvent issus de la nécessité.

 

Le chemin que j’ai pris pour aboutir au val, utilisé par le charroi agricole, cherchait sans doute à donner accès à un monument peu fréquenté. Car il suffit d’un visiteur pour mettre l’oubli en échec.                                     

« Nous sommes dans un lieu peut-être privilégié par l'Evolution même pour qu'Elle puisse SE PENSER », lit-on dans la « Chronique du Recodier ».

 

Somme-082.jpg

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14 novembre 2011 1 14 /11 /novembre /2011 07:14

La grande guerre, la trêve, la grande guerre suivante, la guerre froide, le mur, sa chute, les guerres du pétrole : le chemin de l’absurde.

 

Qu’est-ce que l’absurde ?

 

 

 

 

 

DenHaag 043

 

 

Je crois parce que c’est absurde, dit Tertullien.

C’est absurde, donc je ne crois pas, rétorque Beckett.

L’absurde de l’un n’est pas l’absurde de l’autre.

L’absurde du premier, c’est le miracle, le fait surnaturel, la résurrection qu’un Etre seulement a pu expérimenter jusqu’à présent. C’est l’unicité de l’événement qui fait problème, sa non répétitivité.

 

Tout autre la vision de Beckett. Le surnaturel est doublement absurde car le naturel l’est déjà bien. Il est absurde d’attendre l’Eurostar.

Il est absurde d’attendre.

Le monde a l’absurdité de l’impasse. Une impasse dont on ne pourrait sortir que par le miracle !

 

L’absurdité exige l’absurdité pour être niée.

 

Il ne reste donc rien ?

Il reste le « logos » au sens faible, non la raison mais la parole. Parole minimale pour ne pas ajouter à la confusion. Ecrire comme Racine, mais sur un non-thème. Faire jaillir le rire de l’incongru.

Je ris ou je pleure, c’est pareil.

La conscience procède de la négation ou des limites, selon Whitehead et Plotin respectivement.

Négation de toute possibilité de satisfaction.

 

Vision nihiliste ?

 

Curieusement des textes de Beckett émane une sourde poésie. Une poésie provoquée par l’étrangeté de la vision. Une vision pour laquelle rien n’est évident. Il n’y a pas de lois naturelles. Il n’y a que des habitudes sans fondement.

Dans Molloy, Moran termine son discours par un paradoxe équivalent à dire que quelque chose est et n'est pas en même temps .

Et paradoxe ultime, la fin de L’Innommable selon laquelle il faut continuer alors que l'on ne le peut pas.  

 

Pourquoi continuer ?

 

            

                         Parce que c’est absurde, dit Beckett.

 

                         Parce  que je crois,  rétorque Tertullien.

 

.

 

 

-x-

 

 

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13 novembre 2011 7 13 /11 /novembre /2011 08:40

11 novembre 2011

 Ieper 028

 Ypres      

Flanders Fields Museum

Le saillant d'Ypres, tête de pont de l'assiégé, écharde dans la peau de l'assaillant. D'où l'échange d'une multitude de vies humaines contre quelques kilomètres de gain de territoire.  Alors ici, aujourd'hui, revivre l'impensable,  penser l'invivable, s'interroger quant à l'Absurde.                                                                                                     

cartouche200907

Armes et munitions  pour "faire sécher ceux d'en face sur les barbelés".                                                                             

  La guerre, séquelle de l’homme qui refuse la paix.  La paix, l’homme faisant violence à sa nature.

 Et malgré tout, marche paisible sur les remparts  parmi l’or et le sang de l’automne. Ieper 037-copie-2

 

Ailleurs aussi ce fut la guerre :

La Somme.  Au lieu dit « Chemin des Dames » :

  chemin des croix,

chemin des hommes.

 

"Ce qui a été, c'est ce qui sera" (L'Ecclésiaste). N'y aura-t-il jamais que guerre ou trêve ?

 Parcours des sites :

Bayernwald, à Wijtschate :

  au soleil éclatant

circuit des mines et cratères. Ieper 065

  A la nuit tombante, Cassel :

marche aux flambeaux,

tambours et fifres.

 

A l’aube, brumes et signes de l’innombrable :

        blêmes stèles de Tyne Cot.

 

 

 

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30 octobre 2011 7 30 /10 /octobre /2011 08:51

Back to fractals

 

 

Dans le texte « Après le Bastidon » il avait été question de fractales dont la théorie concerne une géométrie de la nature. Mais elle intervient aussi dans le monde des artefacts, et notamment en art.

Ainsi « La grande Vague » d’Hokusai (1760-1849) constitue un système de formes similaires qui se répètent à des échelles différentes.

Il en va de même d’œuvre de Pollock.

Pourrait on trouver des exemples de fractales en littérature ?

Une réponse affirmative semble découler de la lecture du livre de Juan de la Cruz « Dans une Nuit obscure » dont voici un extrait de la partie poétique.

 

 

Dans une nuit obscure,

Dans l’anxiété, d’amour enflammée,     NewYork-417.JPG

Oh l’heureuse aventure !

Je sortis à la dérobée,

Ma demeure déjà en sommeil.

 

Dans l’ombre, en sécurité,

Par l’échelle secrète, déguisée,

Oh l’heureuse aventure !

Dans l’ombre, incognito,

Ma demeure déjà en sommeil.

 

En la nuit bienheureuse,

En secret, que personne ne me voit,

Et moi-même sans rien voir,

Sans aucun guide ni lumière

Autre que celle qui en moi brûlait.

 

L’introduction du texte en définit la structure : « Dans ce livre est donné en premier lieu l’entièreté des strophes traitées. Ensuite est exposé chaque strophe en tête du texte en prose qui l‘explique. Enfin est traité chaque vers en tant que titre (ou thème) du texte détaillé ».

 

Il s’agit donc d’un poème commenté. Le poème renvoie à la prose, celle–ci fait appel au poème

Poésie et prose sont interactives.

La première dans son entièreté fonctionne comme le tronc d’où se déploie la prose comme les ensembles de branches, chacun à partir d’une strophe. Et de chaque branche jaillit un ensemble de rameaux de même forme, à partir d’un vers de la strophe.

Le texte, poésie et prose, présente donc des caractéristiques de similitude, répétition, différence d’échelle.

L’ensemble du livre de dimension relativement réduites semble inachevé. L’interaction poésie – prose ne concerne que les trois premières strophes sur huit.

La thématique est celle d’un mouvement consistant à « sortir de soi et des choses » pour aboutir à la contemplation. Chemin passant par les affres d’une « nuit obscure » pour déboucher sur la joie.

Processus dichotomique entre joies et peines.

 

À lire le poème seul, on garde une impression de joie à la fois débordante et sereine. Mais la prose révèle tous les efforts accomplis durant le chemin. À l’extrême concision et densité du texte fait écho les aléas d’un long cheminement.

Raccourci de la condition humaine, ce texte en relate la perpétuelle tension entre les contraires. Lui-même est fait de contraires, poésie et prose, synthèse et détail.

Très étonnamment, le poème présent des accents très sensibles alors que son commentaire en exalte le caractère spirituel !

 

C’est une autre caractéristique de la fractale que d’être une expression des contraires, du fini et de l’infini, du détail et de la synthèse. Autant qu’une géométrie de la nature, il peut être envisagé comme une géométrie de l’un et du multiple.

En précurseur, Plotin disait que du multiple à l’un il y a détermination, approfondissement, création, nouveauté. Bref il y a une relation d’intensité. (Ennéades 2,4, 16).

 

 

 

 

La forme du poème est aussi caractérisée par la concision et la densité.

Des répétitions de termes (nuit, aventure, l’aimé) rythment le mouvement de montée dans la nuit culminant à la cinquième strophe (non reprise ci-dessus).

Ensuite demeure la paix dans l’abandon de soi.

Juan de la Cruz est un maître de la concision comme Basho, Rimbaud, Mallarmé, Nescio, Rulfo.

D’un point de vue formel, on trouve un exemple de concision dans le domaine informatique avec le langage Lisp qui permet, par le biais de la récursivité, la construction de sous-programmes constitués par le programme lui-même.

 

Chaque vers,  chaque strophe, tout le poème évoquent « une aventure heureuse », le départ, les circonstances, le but, le guidage, la rencontre, le repos.

 

Le poème entier concerne une nuit « plus désirable que l’aube » dans le chemin étroit de la vie. Chemin  vraiment très étroit que peu n’osent poursuivre si la nuit obscure est celle d’une  négation de soi et du monde pour en franchir les limites.

On songe à l’approche d’un col encore invisible alors que surgit l’idée de faire demi-tour. Chemin où il faut perdre un certain confort pour se vouer à des « chose plus grandes et substantielles ».

 

Le commentaire est donc marqué par la tension entre les sens et l’esprit. Il s’agit d’une traversée du désert où les conditions de vie sont radicalement changées, où s’élargit le point de vue et s’approfondit la vie intérieure.

Au désert devient évident qu’il y a autre chose que l’apparence. Car là aussi peut s’éveiller l’émerveillement. L’imagination cède le pas à la contemplation, le mesurables à l’incommensurable, et, « comme le disent les philosophes, un extrême se connaît au moyen de l’autre ».

La connaissance des lors fait de la traversée une « aventure heureuse ». Sont apaisées les craintes du départ.

 

Le rapport de ce texte avec la randonnée ?

 

Toute marche est une ascèse à laquelle participent les sens, où joie et crainte sont mêlées.

Il y a forcément passage par une sorte de « nuit obscure » lorsqu’on chemine sur un étroit sentier de la mâture, taillé dans le haut de la falaise au-dessus d’un abîme au fond duquel coule un gave impétueux.

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12 octobre 2011 3 12 /10 /octobre /2011 06:42

07.10.2011

 

Après le Bastidon

 Ferret 339

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le col ->

 

 

 

 

 

 

 

                                                                                        

 

 

La lecture soutient la marche et inversément.

D’où ces citations lues bien à propos :

 

Nietzsche : la philosophie c’est la vie libre et volontaire dans la haute montagne.

Heidegger : appeler, c’est mettre en route et sur le chemin.

(Qu’appelle-t-on penser ? p. 131)

 

Si je suis appelé, je réponds en me mettant sur le chemin. Appelé à faire quelque chose, à apporter mon aide, à contempler…

Je prends le chemin tel qu’il est. Mais aussi je le vis comme condition d’un spectacle qui me dépasse. De ce fait, je cours ma chance de dépasser le trivial.

 

La montagne est un appel.

Elle est elle-même le chemin, le but qui est étonnement, émerveillement.

 

Le réel appelle à être vu autrement. Tous  ne répondent pas à cet appel. Il faut être aguerri à l’inattendu. Les événements ne se passent pas comme on le pense. Malgré Parménide, il y a toujours une distance entre la pensée et le réel.

La relation idée-réel se fait par le biais d’une représentation plus ou moins fidèle.

 

Voir l’un dans le multiple est un privilège, résultat de « la vie libre et volontaire dans la haute montagne ».

C’est l’apport de ma visite au col du Bastidon d’où la vue fait le lien entre Mont-Blanc et Grand-Combin, entre la sécurité de la vallée et la précarité créatrice sur la crête.

                                                                                              

Ferret 198

                                                                   

  

 

 

 

 

 

 

Ferret 337

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Cette journée clôturant les journées précédentes en montagne en fut la clé de voûte.  D'où une impression d'ordre.                                                                                                  

                                                              

 “All order is aesthetic order”, dit Whitehead.

 

J’ai souvent constaté que la fréquentation d’un massif permet à partir d’un point de repère de donner des noms à d’autres sommets qui tous ainsi se trouvent mis en relation.    Un ordre est établi.

Il s’en dégage alors une réelle harmonie.

 

Si on observe un massif montagneux, on a l’impression que les montagnes se ressemblent. 

Des formes émergent à partir d’autres formes similaires plus petites.

On retrouve ces phénomènes dans beaucoup de phénomènes naturels. Cette observation a donné lieu à une théorie mathématique, la théorie des fractales.

 

Une fractale est un objet, dont les éléments constitutifs, et les éléments constitutifs de ceux-ci, et ainsi de suite, ont la même forme que l’objet global.

 

Autrement dit, une fractale est un objet géométrique dont tous les éléments à échelles différentes lui sont semblables.

 

La théorie des fractales constitue une géométrie de la nature.

Une branche de fougère, et les branches de cette fougère, etc, ont la même forme que la fougère entière.

On trouve la même propriété pour les arbres, les choux-fleurs, etc, et dans le monde minéral, pour les montagnes, les nuages, les rivages, les galaxies…

 

La photo ci-contre illustre un objet, en l’occurrence une montagne, composé d’éléments plus petits de même forme.

On y voit d’emblée deux caractéristiques des fractales :Ferret 313

la différence d’échelle entre les parties et le tout ; la répétition des objets composant l’ensemble. La montagne entière semble être le résultat d’un processus itératif. 

 

Comment peuvent émerger des formes particulières ?

 

Les montagnes se ressemblent et pourtant il s’en dégage des massifs identifiables.

Le Mont Blanc, le Monte Leone en Ossola (Piémont), l’Aurouze dans le Gapençais, la Montagne de Lure en Provence, le Canigou en Roussillon, le Pech de Bugarach dans les Corbières, la Sierra del Cadi en Catalogne, L’Aigual dans les Cévennes, le Kandel en Forêt Noire, le Schneifel en Eifel,  et beaucoup d’autres encore donnent lieu à une identification immédiate.

Points de repère, montagnes qui ont une âme.

Elles donnent une impression d’unité tout en  recelant souvent une grande diversité d’accidents : coteaux, vallons, chemins…

Leur formidable personnalité semble uniformiser les montagnes avoisinantes.

 

D’où vient cette personnalité ?

 

Leur masse souvent les distingue. Mais aussi leur « design », leur position, une sorte d’émergence qui en fait un aboutissement unique. Leur personnalité n’empêche pas d’y voir un fractale.

Bel exemple de dichotomie où le particulier et l’uniforme coïncident.

 

Ces montagnes exceptionnelles présentent des caractéristiques de « self symmetry » dynamisée par une intervention de l’aléatoire.

Une fractale présente un aspect esthétique.

Des œuvres d’art moderne comme celles de Pollock, des œuvres celtiques, japonaises, égyptiennes, mayas etc… sont issues de la répétition à échelles différentes de forme auto-similaires.

 

La théorie des fractales nous donne à voir autrement un paysage ou une œuvre d’art, à la situer entre l’ordre et le chaos. Elle exprime en matière visuelle un équilibre des opposés, cela même qui est l’objet de la recherche d’un  peintre comme Mondrian.                                                                                                             

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7 octobre 2011 5 07 /10 /octobre /2011 03:48

22.09.2011

 

Val Ferret – Col du Bastidon (2754 m)

 

 

 

 

 

 

 Ferret 334Ferret 308

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Continuer ? Le sentier se colle à la paroi, de plus en plus étroit. Je me retourne. La descente pourrait être délicate. Je la teste sur quelques mètres. Se retourner demande de l’attention.

Le vide ? Un système de relations entre ma position actuelle et d’autres beaucoup plus lointaines vers le bas.

 

Le vide n’existe pas.

 

Je remonte. Le Mont-Blanc reste impassible. Je répète le test un peu plus loin. Ensuite le sentier s’élargit à nouveau et remonte plus franchement. Je monte d’un pas plus assurée. Je perçois la proximité du col. Mais le sentier vire brusquement à gauche. Le col se dérobe. Le sentier revient sur la droite. Et enfin je débouche sur l’autre versant. Le col n’est qu’une entaille dans la roche.

 

Des panneaux donnant des directions confirment que je suis bien au col du Bastidon.

En dessous un vaste plateau occupé par des lacs et un refuge cache la vue sur la vallée qui monte vers le grand Saint-Bernard.

En face, le Grand Combin et le Combin de Corbassier entre lesquels, sur la carte, j’avais repéré une vallée comprenant un torrent, objectif possible de rando.

 

Du côté  val Ferret, de beaux jeux de lumière sur les différents étages de la vallée. Sur le flanc Sud  du Mont-Blanc enneigé une légère vapeur. Il a eu chaud.

 

Je prends des photos cherchant des angles et des objets significatifs.

Tout un paysage se met en place. Je devine l’espace du val d’Aoste.

Je repère le grand col Ferret.

Le Bastidon domine les directions vers l’Italie.

 

                 Mont Blanc Ferret 340

 

 

 

Je redescends. Les deux passages délicats sont franchis à pas rapides, comme autrefois (à partir de 1975) dans les Pyrénées lorsqu’il s’agissait de franchir un névé pentu. Rassuré maintenant, je prend la direction donnée par un cairn.

Je passe de roche en roche. Au  bout de quelques instants, je comprends qu’il ne s’agit pas du sentier assez commode que j’ai pris pour monter. Mais il paraît plus court. Je mettrai 20 minutes pour descendre jusqu’à la pelouse. Une bavante !

 

Qui donc a eu intérêt a utilisé le col du Bastidon ?

Pour moi il donne l’effet d’une esthétique du combat.

 

Je déguste la décente, le soleil dans le dos. C’est le moment qui récapitule toute la randonnée.

L’effort n’était qu’une condition de réussite. Esthétique héraclitéenne fondée sur le succès lors d’un conflit, sur une opposition de forces qui au-delà de la victoire d’un des paramètres contraires, réalise quand même une harmonie.

 

L’ombre envahit la vallée. Les vaches noires d’Hérens s’y fondent. En face, mon itinéraire de la veille se livre complètement.

 

Je reste sur le versant ensoleillé, avec l’impression d’avoir vécu un baptême qui change ma conception des choses.

 

 

   Ferret 328

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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6 octobre 2011 4 06 /10 /octobre /2011 11:21

From NASA to Solutré

 

 

Septembre. De Bruxelles au val Ferret suisse via Lyon.

 

15/ 09.2011

 

Je roule à la fraîche parmi les collines de Lorraine aux contreforts de brume sous un ciel dégagé. À la radio j’entends  qu’un nouveau projet NASA est lancé.

Explorer l’univers malgré la crise financière, occuper mars en 2030.

La distance évoquée dans le temps et l’espace modifie mon regard sur le  paysage           dont les éléments fuient dans toutes les directions.

Nos immenses efforts n’atteindront qu’une marge infime de ce multivers.

Ce multivers offre-t-il des horizons ?

                                                               

  Ferret 050

                                                              <- roche de Solutré

 

Marche au départ de Pierreclos dans le Mâconnais, entre Beaujolais et le pays de Cluny. Le chemin soudain se fait sentier qui monte sur le calcaire parmi le buis et le genévrier.

Biotope caussenard le plus nordique dont je prends connaissance.

Biotope très ancien dont l’aridité est sans doute due à l’activité pastorale remontant peut-être au néolithique.

Haut lieu du Quaternaire, la roche de Solutré sous différents angles atteste l’ancienneté des lieux. Cette montée du sentier vers la montagne de Cras (506 m) est ainsi une remontée dans le temps.   La vigne omniprésente, à l’origine très ancienne, manifeste une continuité pleine d’avenir.

 

Marche préparatoire à celle que je ferai dans le val Ferret  en Suisse. Là encore je monterai dans le temps.

La vache d’Hérens y est un vestige de la préhistoire. Ces vaches rustiques datent du néolithique. Elles descendent directement de l’auroch.

Mâconnais, pays de transition qui est signe aussi de transition d’époques, celles du pléistocène à  l’holocène.                                                                                               

                                                                                                                                                   

                                                                                                                                 

 

 

                                                                                                Vache d’Hérens  :                                                       

 

 

 

  Ferret 164

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voyage qui frôle des couches de temps superposés de la préhistoire à la modernité. Du solutréen à la modernité via le néolithique lorsque l’homme de Neandertal passa la main au  Sapiens.

Coexistence aussi d’êtres différents, naturels ou artefacts. Dans le causse de la montagne de Cras, des murets, purs artefacts, délimitent des espaces où se répandent le buis sauvage et le genévrier.

 

-x-

 

Randonner consciemment, c’est faire de l’un avec du multiple, établir des relations entre les aspects contrastés de paysages et les préoccupations présentes de la pensée pour aboutir aux sensations-pensées de Powys.

 

Comme la navigation, la randonnée implique l’anticipation, la communication. Il se pose une série de questions : quels sont les ressources d’une région, peut-on y trouver du logement, de l’alimentation, des moyens de transport complémentaire ? Quel est l’intérêt culturel de terres désertées ?

Quels sont les prévisions météorologiques ? Car le climat joue un rôle essentiel dans l’activité de la randonnée tout comme dans l’évolution humaine.

 

Mais avant tout, il y a le choix de l’itinéraire. Celui–ci émane forcément d’un désir, d’une vision de l’environnement, d’une anticipation quant à l’intérêt et l’émotion que l’on vivra. Les itinéraires contrastent ou se complètent. Beaucoup méritent d’être répétés dans d’autres circonstances. L’aspect esthétique est essentiel dans le choix de la randonnée qui est une mise en ordre de directions et de bifurcations. Tout ordre est ordre esthétique, dit Whitehead.

Il faut des années pour connaître plus ou moins un grand massif.

 

L’idée d’un itinéraire peut provenir d’une photo, d’une conversation avec des amis, de la lecture fortuite d’un article, de la redécouverte d’une carte topographique achetée autrefois…

De l’idée à la décision se déroule un processus marqué souvent par l’aléatoire.

 

Hasard et déterminisme collaborent dans l’élaboration de ces processus. On sait que le hasard est la rencontre fortuite de séries causales indépendantes. Sans le hasard pas de création ; sans déterminisme il n’y aurait que du chaos.

Le choix d’itinéraires dépend encore du cycle des saisons. Le poète japonais du 17e siècle Basho évoque ce besoin de partir au printemps.

  « Toujours en lutte avec moi-même, je ne connaissais pas le repos lorsque l’esprit de l’errance s’empara de moi. Je ne pus plus rien tenir entre mes mains. M’accompagnait quelqu’un qui aussi était envoûté par le vent et les nuages ».  

L’homme sédentaire soudain est rattrapé par son nomadisme préhistorique. Il se réveille prenant conscience de toute autre chose que son confort immédiat.

      Perce-neige, hellébores, pervenches, jonquilles, anémones sylvie, ail des ours, jacinthes bleues, orchidées, lilas, aubépines, sureaux, tous signes référant à une période de l’année.

Les jonquilles annonçant la fête de pâques couvrent certains bois et campagnes d’une vibrante présence. Je les cherche activement, dans mon quartier à Bruxelles, et plus au sud, au-delà de Mons dans le haut pays des Honnelles, et plus loin encore en baie de Somme, en Vimeu, rive gauche. Je les découvris aussi fortuitement dans le Vivarais par champs entiers. 

  La randonnée est une navigation dans l’hypertexte de l’environnement. On conçoit un itinéraire linéaire muni éventuellement de quelques boucles. Le temps d’arriver au point de départ, des idées surgissent qui aménagent le projet.

  La météo peut faire permuter les séjours en rase campagne et en ville. Je voyage toujours avec un sac rempli de cartes pour documenter des alternatives. Il peut être utile d’effectuer un transfert de quelques centaines de kilomètres pour trouver ce minimum de lumière permettant de mieux percevoir l’environnement.

C’est la météo qui me fit permuter le passage à Lyon avec le séjour en val Ferret et donc m’orienta en premier lieu vers la Lorraine et le Beaujolais.

 Des randonnées antérieures influencent les décisions ultimes, celles que l’on prend sur le terrain.

Une visite du Clunisien en juillet m’orienta vers Pierreclos dans le mâconnais. Les souvenirs peuvent agir comme des fossiles excitant l’intérêt du paléontologue sur le terrain.

Ceci donna à innover dans ce massif inépuisable qu’est le Beaujolais, en foulant sa frange nord qui se confond avec le mâconnais. Mon nouveau point de vue permit de situer mes pas de juillet via le rocher de Roche Coche et le bourg de Berzé-la-ville.

Et aussi de repérer sous un autre angle le rocher de Solutré. D’un coup d’œil, une glissade dans le temps via le moyen-âge jusqu’à la préhistoire.

Le solutréen, -20 000 ans, le pléistocène, transition de l’homme de Neandertal au Sapiens,   l’art pariétal…

  Berzé, Solutré, des traces d’autres réalités fort écartées dans le temps mais unifiées dans ma pensée, ici en septembre 2011, sur ce causse que je viens de découvrir, lui-même trace d’une civilisation pastorale.

Je ne suis plus seul, une foule m’entoure, je tente d’ordonner un discours imaginaire.

Le grand bleu donne au pays sa pleine sérénité. Et je prête une attention particulière aux vignobles qui se répandent sur le versant.

Il est la trace d’un effort continu, d’une foi intense dans la valeur d’une activité qui sera reconnue dans le monde entier par ses produits de qualité, les vins d’un terroir particulier.

  Les fleurs aussi sont des traces. Ici je repère l’oeillet rose. Quelques semaines plus tôt, dans le Palatinat, j’avais repéré les colchiques en avance sur l’automne. En Lorraine j’avais été séduit par quelques gentianes d’automne d’un bleu profond. La rareté de ces fleurs accentuait leur signification.

La randonnée est un processus analogue à la programmation symbolique : concevoir, exécuter, éditer un output d’images, de rencontres, d’impressions…

16/09/2011 

Lyon, charnière plutôt que parenthèses.

Charnière entre le Nord et le Sud, entre les deux phases de mon périple.   Qui séjourne à Lyon ne doit pas opter pour l’Est ou l’Ouest, le Nord où le Sud. Plaque tournante entre les grands massifs montagneux,  tout lui est possible. Lyon illustre la coïncidence des opposés. ,

 

  Ferret 091

 

  Ferret 143

 

 

 

 

 

 

 

 

           Le Rhône ouvre l’espace vers d’autres horizons. Les torrents du Valais s’unissent dans une profonde méditation vers la lumière de la méditerranée. Les vapeurs du fleuve rafraîchissent les puissants vignobles maintenus avec art sur les coteaux.                                                                  

                                                                                                                                                                                                                                                  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                           

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